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Comment prendre ce cas en charge ? #2

  1. Comment prendre ce cas en charge ? #1
  2. Comment prendre ce cas en charge ? #2

Nous vous avons présenté le cas de cette patiente dans notre post précédent et suggéré plusieurs voies de prise en charge.
Deux propositions proposaient de référer la patiente à des spécialistes

dont les compétences pouvaient être complémentaires de celles du chirurgien dentiste, de façon à ne pas se lancer dans une prise en charge trop restrictivement odontologique. Cette attitude prudente peut se comprendre mais elle constitue une négation de nos compétences propres. A quoi bon connaître l’avis d’un ostéopathe ou d’un centre de prise en charge de la douleur si nous n’avons pas, nous mêmes, fait le bilan complet de la situation du patient pour notre champ de compétences ? Que peut-on répondre à ces spécialistes s’ils nous interrogent sur la situation mandibulaire du patient, alors que nous n’aurions pas fait le bilan et proposé une hypothèse diagnostique incluant tous les éléments de l’odontologie ?
D’autant que c’est précisément dans le champ de l’odontologie que se situe la solution des problèmes de cette patiente.
La première chose à faire, comme dans de très nombreux cas (des millions en France), c’est d’identifier la position mandibulaire d’ORC approchée et d’analyser le décalage entre cette position mandibulaire et la position d’OIM (ici, les positions d’OIM).

Fig 1 : Situation occlusale droite quand la mandibule est placée en position d’ORC approchée, par manipulation du praticien
Fig 1 : Situation occlusale droite quand la mandibule est placée en position d’ORC approchée, par manipulation du praticien
Une bonne manipulation permet d’obtenir très souvent une approximation fiable de la position mandibulaire d’ORC approchée. Et là, les choses s’éclairent : on peut palper les contractures qui apparaissent ou les décalages intra-articulaires entre les positions mandibulaires.
Dans ce cas il n’y a pas de contracture des élévateurs ni perturbations discale. On peut par contre comprendre qu’il est physiquement impossible de caler et centrer simultanément la mandibule dans l’ORC. On le voit immédiatement.
Et si on prend le temps de regarder un peu plus en détail les contacts occlusaux dans cette position mandibulaire d’ORC approchée, alors on voit des choses hallucinantes du point de vue de la dentisterie restauratrice.

Mais vous trouverez encore des gens qui vous diront que l’occlusion n’est pas « la cause » des désordres de l’appareil manducateur…qu’aucune publication scientifique ne peut le soutenir… que les experts sont unanimes et que les recommandations de prise en charge des DAMs sont claires.
Alors, que faire ?
D’abord valider l’hypothèse diagnostique du rôle « causal » de l’occlusion dans les désordres mandibulaires décrits (et pourquoi pas dans les douleurs cervicaux-faciales imputées à une arthrose, et pourquoi pas dans le fond dépressif et anxieux pour lesquels le médecin traitant prescrit Effexor® ?).
Comment valider l’hypothèse diagnostique sans se lancer dans une intervention irréversible ou mutilante ? En utilisant une orthèse ! C’est tellement simple.

Alors on fait une gouttière mandibulaire, lisse, réglée en ORC approchée puis équilibrée en quelques séances.

Si je vous dis que la situation mandibulaire de la patiente est redevenue immédiatement confortable le croiriez-vous ?

  1. Le confort mandibulaire étant acquis grâce à l’orthèse, quelle est la marche à suivre pour une prise en charge odontologique durable ?
  2. Faut-il informer le médecin traitant des résultats obtenus ?

Comments

rene

pour la suite du cas, on peut:
– diminuer l’orthese petit a petit pour diminuer la béance antérieure
– puis meulage d’occlusion , (on voit des coiffes en surocclusion sur les photos)
– et si besoin composites (onlay ou directs) pour stabiliser

moi , je ne previens personne, car on risque de voir arriver au cabinet tous les « psy » du coin

rene

françois
j’aimerai sur un autre post qu’on parle du temps passé , du nombre de seances, du cout et de la facturation de ces actes
et aussi de la ccam

merci

François UNGER

rene vous avez raison il faut parler de la gestion du temps (et donc financière) dans la prise en charge des patients DAMs.
Je ne suis pas un expert ni un modèle vis à vis de ce point car je bénéficiais du DP ce qui me permettait de facturer avec un minimum de souci. Concrètement je facturais forfaitairement 480 euros les actes suivants (quels que soient les patients et le nombre de séances): consultation initiale, fabrication de l’orthèse, équilibrations de l’orthèse, analyse occlusale en ORC sur galetti, dépôt de l’orthèse et au besoin, contrôle dans l’année suivante. Si une équilibration simple (par soustractions mineures) était nécessaire, elle était aussi comprise dans le forfait. En moyenne 6 à 8 séances.
Je ne comptais pas dans ce forfait: l’analyse occlusale complète avec mise en articulateur et simulation des soustractions et additions, les éventuels scanners ATM (dont je disposais), ni la réalisation éventuelle de prothèse transitoire que pouvait (exceptionnellement) me demander mes correspondants (400).
Autrement dit, ce forfait de 480 euros que me permettait le DP, me laissait tout juste de quoi ne pas être déficitaire (bénéfice quasi nul en fin d’année, mais j’avais la paie de l’Université et de l’hôpital). Alors j’imagine qu’un confrère qui travaille au prix de 172 euros opposables n’a aucune chance de ne pas faire faillite.
Et c’est là qu’il faut dénoncer la duplicité politico-administrative: pousser les praticiens à la faillite c’est leur dire, soit, « ne vous occupez pas des patients qui souffrent de DAMs », soit, « rattrapez vous en facturant des traitements restaurateurs ». Ces deux attitudes sont intolérables; mais c’est notre façon de concevoir la « santé publique » dans notre beau pays.
Il pourrait exister une option plus tordue: faire appel à des actes ne faisant pas partie de la CCAM (équilibration? analyse occlusale? montage en articulateur? programmation de l’articulateur?…pour retrouver du hors nomenclature qui permettrait de couvrir les frais que nécessitent les prises en charges des DAMs. Mais enfin ce genre d’attitude n’a pas d’avenir pour les millions de patients potentiels.

Ce blog a aussi comme prétention d’aider celles et ceux qui prennent des risques économiques pour soulager des patients abandonnés par les organismes sociaux et les experts.

mdom

Bonjour,
La situation est devenue confortable… C’est-à-dire plus précisément ? La patiente ne se mord plus la langue et les joues lorsqu’ elle mange ? Peut-elle couper plus facilement les aliments ? Est-ce que les douleurs au niveau de la face et du cou ont disparues ?
J’explique le fait que la situation mandibulaire est devenue confortable par la détente des muscles masticateurs (et des muscles de la posture céphalique) grâce à l’orthèse (portée la nuit seulement ?) qui permet de guider, de centrer et de caler la mandibule avec une activité minimale de l’appareil manducateur.
Quand est-ce que la patiente porte l’orthèse ? La nuit, le jour pendant les repas ?
D’autre part, l’ORC dépend de la posture de la tête et du corps. Si on conseille à un patient de porter une orthèse la nuit (en cas de serrement nocturne par exemple), pourquoi ne la règle-t-on pas en ORC lorsque le patient est en position allongée (position se rapprochant de la position de sommeil) plutôt qu’en position assise ?

Concernant la prise en charge odontologique durable.
Je pense qu’il faut faire au plus simple en général, surtout compte tenu d’une certaine fragilité psychologique de la patiente (Effexor®).
Si la patiente est d’accord pour le port de l’orthèse, en cas de besoin, à vie. Alors nous pouvons essayer le dépôt progressif de l’orthèse comme expliqué dans un post du blog très intéressant « iOcclusion/ le blog ». En cas de réapparition de l’inconfort masticatoire et/ou douleurs cervico-faciales, la reprise du port de l’orthèse sera conseillée.
Sinon, il faut faire une analyse occlusale, et évaluer le rapport bénéfices/inconvénients des modifications occlusales nécessaires à l’obtention de l’ORC validée par l’orthèse.

Concernant l’information du médecin traitant.
Je pense qu’il est intéressant de lui faire un courrier pour lui expliquer les résultats obtenus pour deux raisons :
1/ l’anxiété et la dépression sont probablement accentuées par l’inconfort masticatoire et la douleur chronique cervico-faciale. Peut-être le médecin, grâce à l’amélioration de la santé de la qualité de vie de la patiente, envisagera-t-il la diminution voire l’arrêt progressif de certains médicaments traitant les pathologies qui peuvent avoir un rapport avec le stress (Effexor®, Gaviscon®, Debridal®, etc…) ? Ce qui est bénéfique pour la santé de la patiente et les dépenses de l’assurance maladie.
2/De façon générale, pour que les médecins généralistes, qui sont des confidents des patients, connaissent mieux le rôle des chirurgiens-dentistes dans la prise en charge des patients leur rapportant des symptômes de DAM.
Merci François Unger pour nous montrer cliniquement que, l’occlusion comme étant un facteur intervenant dans l’apparition des DAM, n’est pas un mythe.

Pour rene, la CCAM ne prévoit que la prise en charge par l’assurance maladie de l’orthèse (« plan de libération occlusale » = environ 172 euros).

François UNGER

Merci à mdom pour ces questions et explications.
Quelques réponses tout d’abord:
– Situation plus confortable veut dire disparition des douleurs cervicales, et quasi disparition des morsures de joues et de langue.
– l’orthèse est portée la nuit uniquement
– Je n’ai pas d’explication rationnelle à l’observation très juste que vous faites: pourquoi régler l’orthèse en position orthostatique alors qu’elle est portée en position de décubitus? Peut on imaginer que les réglages successifs de l’orthèse (au fur et à mesure de l’augmentation de la détente musculaire) permettent d’obtenir une position centrée et stable sur l’orthèse, à la fois en position de décubitus et en position orthostatique?
Pour ce qui concerne la suite du traitement, il faudra bien entendu s’interroger sur la faisabilité de rétablir une OIM en denture naturelle qui restaure simultanément le centrage et le calage mandibulaire. L’analyse occlusale en ORC, suivie d’une simulation des travaux à réaliser, de l’équilibration et éventuellement de la prothèse est la voie la plus classique. Mais je rebondis sur votre option de « gouttière à vie ». Ce ne peut pas être la proposition final. mais on peut aussi, si l’équilibration est trop lourde, prendre le temps de recourir par périodes à l’orthèse. On sait que si on dépose petit à petit l’orthèse après le soulagement du patient, les troubles ne réapparaissent pas obligatoirement, ni tout de suite. On peut donc, dans un nombre non négligeable de cas, maintenir le confort obtenu sur le long terme (ou en cas de crises), par l’utilisation intermittente de l’orthèse (dont on contrôle la stabilité du réglage ou qu’on modifie) en port nocturne. Cette option thérapeutique, qui ne peut pas être présentée comme la solution idéale pour l’ensemble des cas, rend de grands services: contrôle des douleurs, atténuation très forte de l’anxiété liée à l’inconfort oral, coût très faible, préservation de l’avenir, objectivation du rôle de l’occlusion dans la réapparition et la suppression des troubles, etc…

Pour le reste je partage totalement ce que vous proposez pour l’information du médecin traitant.
Merci de votre contribution très raisonnable et clinique. Je pense que bien des patients doivent en bénéficier; Bravo

yevninemichel

en ce qui concerne le traitement, une orthèse peut tout à fait être un secours de temps en temps…. si ça fait pas de bien c’est rare que ça fasse du mal….et puis celà peut effectivement devenir un  » objet transitionnel » en termes psy….
pour les cotations et les honoraires nous sommes confrontésà un simple problème de gestion…. on calcule le cout horaire du cabinet, on  » estime  » le temps passé pour un traitement et on fait le rapport… pour avoir le montant des honoraires… j’ai coutume de dire que l’occlusodontie est  » ma danseuse….. » celà ne rapporte pas ce qu’on y investi à part en satisfaction professionnelle et personnelle de se sentir utile
pour les cotations en ccam:
LBMP003 : réalisation de moulage d’étude des arcades dentaires (NPC : non pris en charge)
LBQP001 : enregistrements des rapports maxillo-mandibulaire en vus de la programmation d’un articulateur NPC sauf cas particuliers d’agènésies et suite cancer
HBLD018 : pose d’un plan de libération occlusale 172.80 pris en charge à 70%
HBMD061 : séance d’ajustement occlusal par coronoplastie
donc nous somes obligés de faire du NPC l’ancien hors nomenclature.
effectivement si nous rentrons dans le champ politique c’est un scandale que les pouvoirs publics se désengagent de la sorte, d’autant qu’ils cherchent à reporter la charge financières sur les complémentaires qui continuent d’assoir leurs remboursements sur le remboursement de la sécuté sociale, au lieu de tenir compte de la nomenclature….. bref nous sommes obligés de travailler « à perte » ce qui est interdit par la loi… on marche pas sur la tête là??????

plt35

De l’intérêt de traiter les dam
À ma sortie de la fac, l’occluso, je n’y comprenais rien, le flou total.Pourtant, j’avais bien conscience que pour réaliser une bonne reconstruction prothétique, la maîtrise de cet enseignement était indispensable . Et un jour mon prothésiste m’a demandé si je pouvais voir une de ses amies pour des troubles de l’occlusion. Et là, il a bien fallu s’y mettre. Par chance ça a marché 95%!des troubles ont disparu. Cette expérience heureuse m’a donné envie de continuer et de tenter de cerner cette discipline complexe mais passionnante ( j’ai même fait le DIU de posturologie).Comme le confrère précédent si je compte le temps passé et le prix de l’orthèse , je suis perdant. Pourtant pour être honnête , en plus de la satisfaction personnelle, les retombées en terme de notoriété sont importantes . Quand vous avez soulagé une patiente qui souffrait depuis des années parfois, sans que personne n’ait réussi quoi qu ce soit avant, il est rare qu’elle aille chez quelqu’un d’autre ou qu’elle discute vos honoraires pour faire une nouvelle prothese. De même, son ORL, son médecin , son osteopathe vous adresserons volontiers des patients pour lesquels ils sont dans le doute ou en échec.
Je pense donc qu’il faut dire que l’occluso, c’est rentable pour nous, pour la pérennité de nos traitements et donc pour nos patients.
En tout cas, un grand merci à Francois Unger pour la qualité de ce blog.

François UNGER

Si votre sérieux et votre notoriété guident vers vous un nombre toujours plus grand de patients pour lesquels vous êtes déficitaires, à terme c’est la faillite assurée. Mais le plaisir de rendre service et de soulager, la fierté de savoir que des patients vivent mieux, que la sécu fait des économies…

plt35

Désolé , j’ ai répondu aux commentaires et pas à la question !
Dans un cas comme celui là, mon attitude serait de temporiser avec la gouttière , et de réévaluer au bout de 6 mois. Le but de la réévaluation : confirmation de la disparition des troubles manducateurs et évaluation de l’état psychologique de la patiente ( avec le généraliste ).
En fonction des conclusions, soit tenter l’arrêt du port de l’orthèse, soit envisager de stabiliser l’ occlusion retrouvée par des prothèses ou une équilibration.
Ce n’est pas une réponse de normand ( je suis breton) , car souvent le patient sait ce qu’il lui faut et c’est lui qui nous souffle le bon plan de traitement.

François UNGER

Sincèrement, et sans critique du médecin traitant, « l’évaluation psychologique » est parfaitement normale. Juste un sorte d’inquiétude latente majorée par l’incapacité de la médecine de comprendre et soulager des désordres oraux et douloureux mineures mais invalidants à la longue.

Pour le « traitement », le soulagement avéré de la patiente par l’orthèse sur quelques mois, son peu d’enthousiasme à s’engager dans une restauration occlusale qui remettait en cause toutes ses prothèses, ont peut être abouti à un certain maintien transitoire et alternatif de l’orthèse. Je n’ai plus suivi ce cas qui a été repris en charge par son chirurgien dentiste après le soulagement obtenu.

laborde

Bonjour,
Dans quelle(s) position(s) du corps analyse t-on, d’un point de vue occlusal, un patient ? traite t-on un patient ?, équilibre t-on un patient ? Ces questions semblent être une préoccupation pour beaucoup d’entre nous ? position allongée ?… assise ?… debout ?
Il faut hiérarchiser les réponses :
C’est la flexion ou l’extension du coup par rapport au corps, qui est l’élément majeur à éviter, que l’on soit allongé debout ou assis; car le patient aura des schéma de fermeture très différents.
C’est donc d’avoir une posture du coup dans le prolongement du rachis qui est importante.
Les patients sont le plus souvent traité en position allongé, équilibré dans des positions allongé (coup dans le prolongement du rachis).
Le travail clinique est alors réalisé dans de bonnes conditions pour le calage et le centrage, et même le guidage. Dans la plupart des cas, cette attitude est suffisante pour redonner confort et adéquation fonctionnelle au système (ATM, muscles et dents) au patient avec facilité de mouvement et donc, une économie d’énergie.
Il est vrai que, le situation clinique antérieure révèle un angle interincisif trop verticalité, les contraintes peuvent être ressenti par le patient . Ceci n’empêche pas et nécessite un contrôle de la fonction antérieure en position relevé.
A noter que François Unger a généreusement donné des renseignements cliniques nombreux et précis dans les attitudes cliniques de l’analyse clinique de l’occlusion, avec notamment plusieurs post intitulés « Palper l’occlusion » qui sont irremplaçables.

François UNGER

Merci Gilles de ton intervention importante: oui il faut absolument éviter de travailler en bouche, et sur l’occlusion en particulier, en plaçant la tête dans une position forcée, ou déplacée, par rapport à une situation orthostatique moyenne. Car effectivement la position mandibulaire est alors différente. Chacun peut le constater sur lui même: la tête droite, serrer les dents (fortement) pour bien ressentir son OIM. Puis dans cette position, basculer la tête en hyperflexion arrière ou vers l’avant. Vous sentirez vous contacts occlusaux d’OIM glisser, marquant ainsi le changement de position mandibulaire.
Amitiés
François

jeam

Bonsoir,

Je suis sincere je sosrs de fac et l’occluso et moi ca fait deux. Etant consciente de cette lacune j’aimerais vraiment en savoir plus: Une formation ou livre ( pas trop difficile au début svp pr ne pas me degouter).

Merci bien,

Respectueusement,

François UNGER

« L’occlusion tout simplement » de Gérard Duminil aux Editions Espace ID
Il y a les fondamentaux et les choses sont expliquées simplement…comme le dit le titre.
Cordialement

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