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Cas clinique #1 – Partie 2

Note à l’attention du lecteur
Conformément au principe des tests de concordance des scripts, les questions ont été posées à un panel de 10 praticiens (5 endodontistes et 5 omnipraticiens). Leurs réponses sont synthétisées dans les graphiques ci-dessous – les carrés représentant la moyenne des réponses, et les lignes, l’étendue des divergences. Vous pouvez comparer vos intuitions aux réponses de chacun des groupes qui sont, comme vous pourrez le constater, finalement loin d’être unanime. C’est tout l’intérêt de la concordance des scripts. Tout le monde a raison, et personne n’a tort ! Pour en savoir plus sur le format de nos messages : https://www.idweblogs.com/e-endo/nouveau-sur-idweblogs/

Votes des experts

Si vous pensez que la patiente présente un abcès apical sur la 15…

…et que vous apprenez que son praticien lui a prescrit des antibiotiques, et que la douleur a disparu après 5 jours. Cette nouvelle information confirme votre diagnostic ?

Fig. 1
Fig. 1

…et que vous constatez que la percussion axiale est négative sur 14 et 15. Cette nouvelle information confirme votre diagnostic ?

Fig. 2
Fig. 2

Si vous pensez que la patiente présente une fracture sur la 14…

…et que vous observez un sondage parodontal de 6mm en mésial de la 14. Cette nouvelle information confirme votre diagnostic ?

Fig. 3
Fig. 3

La situation est assez complexe car la patiente présente en fait deux problèmes distincts. Un problème sur chaque dent.

Sur la 15, l’image radio-claire confirme la présence d’un foyer infectieux intra-canalaire. La qualité du traitement canalaire visible sur la radiographie est en accord avec cette suspicion. Mais cette dent est-elle responsable de l’abcès que la patiente a présenté récemment ?

L’image radio-claire visible à l’apex de 15 confirme la présence d’une lésion. De l’état chronique, non douloureux, l’évolution a pu se faire vers une phase aigue (douloureuse) voire abcédiée (abcès apical) qui se serait drainé par fenestration de la corticale vestibulaire.

Néanmoins, l’histoire endodontique et l’image radiographique sur la 14 doit également être prise en considération.

Le traitement canalaire qui semble radiographiquement correct, n’a pas permis de dissiper la douleur rapportée par la patiente (douleur persistante depuis 2 ans). Probablement la raison pour laquelle le praticien traitant n’avait pas réalisé la reconstitution prothétique d’usage.

Lors de la consultation initiale, un sondage parodontal a permis de mettre en évidence un perte d’attache très localisée au niveau de la face vestibulaire de cette dent. Ce sondage en « U » est pathognomonique d’une fracture radiculaire verticale.

Fig. 4
Fig. 4

Le trait de fracture se comporte comme une porte d’entrée supplémentaire pour les bactéries. En s’enfichant dans ce trait de fracture, elle provoque une irritation locale de l’os en regard créant ainsi sa résorption et l’apparition d’un tissu de granulation. Qui a son tour, peut passer en phase aigue voire abcédiée.

Les lésions étant refroidies au moment de la consultation, il est difficile de dire si l’abcès est lié à la 14 ou à la 15.

Les deux pathologies ayant été identifiées, deux traitements doivent être mis en place. A savoir, le retraitement de la 15 et l’extraction de la 14.

Fig. 5
Fig. 5

À propos de la prescription des antibiotiques

L’apparition d’un abcès renvoie le clinicien, à juste titre, à la présence d’un foyer infectieux. Pour autant, la mise en place d’une antibiothérapie n’est souvent pas justifiée (dans le cadre d’un abcès d’origine endodontique). En tout cas, certainement pas à visée antalgique.

Une antibiothérapie peut être justifiée pour protéger le patient d’une complication générale. En l’absence de signes généraux (diffusion (cellulite), fièvre, asthénie, etc.), ou dans un contexte médical qui le justifie, la prescription d’une antibiothérapie n’est pas justifiée. Si la discussion peut être engagée dans le cas d’un abcès apical aigu qui s’accompagne d’une collection supurée intra-osseuse, elle l’est beaucoup moins dans les autres cas au regard des différentes recommandations médicales et dentaires dans le cas où la collection est drainée soit par une fistule, soit par un abcès.

Comments

Bonjour Stéphane,
et merci pour cette contribution sous un format très original.
Le rappel que tu fais sur la prescription d’antibiotique est indispensable… mais je vais me faire l’avocat du diable :
imaginons une situation d’abcès sur une 27, pilier de bridge, reçue en urgence (douleurs) dans un cabinet d’omnipratique, sans le moindre endodontiste à 200km à la ronde.
La recommandation serait une prescription graduelle d’antalgiques purs (pas d’AINS) et la réalisation d’un geste rapide de décontamination canalaire. Or, dans une situation de ce type, il faut déposer la prothèse (et peut être même prévoir une prothèse transitoire) déposer l’inlay-core (ou la reconstitution), désobsturer et cathétériser 4 canaux et irriguer abondamment… 1h de travail au minimum… et le planning est plein à craquer sur 2 mois…
Avouons que la prescription d’antibiotique est tentante… ne serait-ce que pour se donner un peu de temps.
Qu’en penses-tu?

Stéphane SIMON

Merci pour cette question qui reflète parfaitement les inquiétudes du quotidien.
Antibiothérapie a un sens si il y a infection.
Dans les problèmes d’origine endodontique, la douleur péri apicale est liée dans la majorité des cas à une inflammation aiguë – Plus rarement à un Abcès apicale aigu. Dans les deux cas, l’origine est bien infectieuse, mais INTRA Canalaire.
Même si l’on prescrit des antiobiotiques, comment vont ils faire pour gagner leur cible, à savoir l’intérieur du canal, qui a priori est dénué de toute vascularisation.
Une prescription dans ce cas précis n’aurait de sens que pour prévenir une flambée bactérienne et une diffusion vers les tissus périphériques. Dans ce cas, l’antibiothérapie est PREVENTIVE mais aucunement CURATIVE.

Il est effectivement impossible de faire la différence entre une douleur d’origine purement inflammatoire (avec exsudat et augmentation de pression dans la crypte osseuse) et infectieuse (Abcès Apical Aigu avec collection suppurée dans la même crypte).
Dans les deux cas, la douleur est liée à une surpression. Et seul le drainage permet d’obtenir une suppression de la douleur.
Doit on prescrire des antibiotiques à tire préventif, le débat reste ouvert, mais certainement pas pour gagner du temps et à visée antalgique.

Quant à la prescription ou non d’AINS, le débat reste ouvert de façon permanente. On vient de diffuser une très belle formation de Vianney DESCROIX sur le sujet, qui est gratuite en période de confinement (période où ces lignes sont publiées). Pour voir la formation « Les AINS en Médecine Buccio Dentaire (et en endodontie notamment) : c’est ici :https://vimeo.com/user64048381/review/401076924/b9ace39b17

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